Ecologie : prenez conscience et évoluez

Comment nous pourrions sauver le monde selon Pierre Rabhi

Par Cyril Renault , le dimanche, 20 décembre 2015, 9h52 , mis à jour le mardi, 31 mars 2020, 16h39

sauver le monde Pierre Rabhi
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Comment nous pourrions sauver le monde selon Pierre Rabhi

Le principal but de l’agriculture est de nous nourrir et non de produire, ce qui n’est pas du tout pareil. Connu pour son fervent engagement en faveur d’une éthique de consommation respectueuse de l’homme et de l’environnement, Pierre Rabhi annonce le chaos qui pourrait se produire si nous continuons dans cette forme de croissance.


La terre, se meurt. Malgré la suspicion que suscite l’évidence, qu’elle soit rétro, rance ou réac, notre monde est arrivé à une étape importante où, faute de se soumettre, les puissances qui dirigent nos destins devront disparaître. Pierre Rabhi résume au travers d’un message simple et clair: si nous ne protégeons pas ce qu’il reste de la mince couche de terre arable d’une quarantaine de centimètres grâce à laquelle nous vivons, nous ne parviendrons pas à sauver la planète et nous disparaîtrons.

Une couche de terre non seulement nourricière, mais qui conditionne l’évolution sociale, politique et culturelle de l’humanité.

«C’est à cette Terre Mère que nous devons les oiseaux du ciel, la beauté des fleurs, la majesté des arbres, les aurores, les crépuscules que nous pouvons admirer et tout ce qui nourrit notre univers intérieur en ces temps de sécheresse des esprits et des âmes», annonce Pierre Rabhi en avant-propos de l’Agroécologie, une éthique de vie, qu’il publie sous forme d’un entretien avec Jacques Caplat, un autre éminent agronome. Et de préciser : «Avec l’ère de la technoscience, de l’industrie lourde, de la productivité et de la machandisation sans limites de tout ce qui peut avoir une valeur, on ne voit plus dans la terre, les végétaux, les animaux, qu’une source de profit financier. Avec les semences standardisées, dégénérescentes, non reproductibles, les organismes génétiquement modifiés, brevetés, les engrais chimiques, les pesticides de synthèse, la monoculture, l’irrigation à outrance, le machinisme intensif, un processus meurtrier est déjà bien engagé.»

« L’AGRICULTURE MODERNE A PORTÉ GRAVEMENT ATTEINTE À L’INTÉGRITÉ PHYSIQUE, BIOLOGIQUE, ÉNERGÉTIQUE DE LA TERRE NOURRICIÈRE. »


Pierre Rabhi cible le vrai coupable de cette situation, la pugnacité du système néolibéral à se dépasser constamment : «L’agriculture n’a pas échappé à l’idéologie du productivisme qui caractérise l’obsession de la croissance et qui n’est rien d’autre que l’avidité humaine érigée en principe d’existence sur la planète entière. Suivant les processus et les mécanismes inspirés par la loi du marché et du profit illimité, l’agriculture moderne a porté gravement atteinte à l’intégrité physique, biologique, énergétique de la terre nourricière.»

«Le bilan économique, écologique et social, loin d’être positif, est dramatique : destruction de l’humus, des sols et de la vie, pollution des eaux, perte de la biodiversité domestique animale et végétale, disparition des vrais paysans, de leurs savoir-faire et de leur culture, dévitalisation de l’espace rural, avancée de la désertification, manipulation et brevetage des semences… Par ailleurs ce mode de production agricole se révèle être le plus onéreux, vulnérable et dépendant de toute l’histoire de l’agriculture. Avec les pratiques inspirées de l’industrie, plus de 15 000 l d’eau potable sont nécessaires pour produire 1 kg de viande. Il faut près 2 t de pétrole pour fabriquer 1 t d’engrais et jusqu’à 10 calories d’énergie pour obtenir une seule calorie alimentaire. Voilà où mène cette opération obstinée qui consiste à transférer le maximum d’énergie humaine vers l’industrie en produisant avec le minimum d’agriculteurs. La terre est vivante et ne peut donc subir toutes les exactions violentes sans de graves conséquences pour les générations à venir.»

Optimisation des ressources


L‘agronome humaniste lance un formidable défi en proposant un remède à ce triste constat : l’agroécologie. Ce concept associe l’agronomie à l’écologie, c’est-à-dire le travail de la terre dans le respect de l’environnement. Plus qu’un programme et une méthode, plus qu’un processus et une vision, l’agroécologie est une éthique de vie. Sans entrer dans les arcanes de cette éthique, et en résumant à l’extrême, elle prétend nourrir l’humanité en évitant l’industrialisation de la terre par une optimisation des ressources à partir des atouts d’une agronomie durable aujourd’hui oubliés

UN PETIT OUVRAGE QU’IL FAUDRAIT DISTRIBUER DANS LES FACS ET LES ÉCOLES.

En voici quelques éléments : «S’appuyant sur un ensemble de techniques inspirées des processus naturels comme le compostage, le non-retournement du sol, l’utilisation de purins végétaux, les associations de végétaux, l’usage des semences libres, reproductibles et transmissibles de génération en génération [aujourd’hui encadrées par une réglementation totalitaire et antilibérale], etc., elle permet aux populations de reconquérir autonomie, sécurité et salubrité tout en régénérant et en préservant leurs patrimoines nourriciers pour les transmettre vivants, et même améliorés, aux générations suivantes.» Et l’humble paysan ardéchois de poursuivre en légitimant le phénomène : «Même les grandes institutions internationales, après l’avoir négligée, handicapée ou récupérée, en reconnaissent aujourd’hui la puissance et la pertinence.»


>L’Agroécologie, une éthique de vie, de Pierre Rabhi, 80 p., 8 €.

Source:  marianne

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Cyril Renault

C’est très probablement mon père qui m’a transmis cette passion que j’essaierai moi-même de transmettre à mes enfants. Dès que j'ai un peu de temps, je profite de l’occasion pour passer du temps dans la nature. Par ailleurs, je m’intéresse également à tout ce qui touche au bien être et à l'écologie de près ou de loin, je suis fasciné par toutes les méthodes d’investigation, vérifiables et reproductibles ayant pour but de produire des connaissances. J’ai donc décidé de rédiger des articles qui touchent à ces domaines. J’espère pouvoir vous transmettre un peu de mon savoir et de mon amour pour la nature.

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